vendredi 30 mai 2008

Rencontre du troisème type

Enfin à pied d'oeuvre , nous sommes anxieux juste ce qu'il faut face à ce qui nous attend: un beau massif au sud sur 180 °, avec quelques sommets enneigés .


Nous cherchons la route de Duut à la sortie de Khovd, prononcer « dououte », avec « ou » long sinon personne ne comprend , et malgré nos efforts d’articulation, on nous indique un chemin sablonneux qui ne fait pas bien notre affaire.
Quart d’heure technique, carte, boussole, cap vers la montagne, vers la rivière « Buyant », prononcer bouillante, joli nom pour un torrent.
Nous plantons la tente pour la première fois sur la terre mongole, séquence émotion, au milieu de ce qui ressemble fort à une périphérie de terrain vague, quel bel euphémisme, vu que ce qu’on y trouve est tout sauf vague, ici comme ailleurs.
Nous campons au bord de l’eau, face à nos nombreux voisins éleveurs, leurs yourtes et leurs troupeaux, pattes courtes et pattes longues , sous un beau coucher de soleil accompagné de pluie sur tout l'horizon, sauf au-dessus de nos têtes, heureux présage .
En cherchant du bois près d’un des rares espaces cultivés et clôturés, je me fais presque kidnapper par un sympathique pochard local, gardien et jardinier de son état. Il prend un bain de pieds dans une petite rigole d’irrigation, et veut absolument m’aider. Il va chercher sa femme, plus portée sur l’eau de boisson que lui. Elle parle un anglais rudimentaire et bien pratique, appris en une année à l’université de Khovd, et les explications reprennent, lexique franco mongol à l’appui. La conversation est assez fluide bien qu'entrecoupée des borborygmes alcoolisés du mari et d'un de ses copains, dont j'ai un peu de mal à me décoller .
Nous voici invités pour la soirée si le temps devient mauvais, je décline l’invitation avec remerciements, et je m’apprête à partir, mais pas les mains vides. Notre héros s'en tire avec les honneurs en me gratifiant d’un sac de bois tiré de sa réserve avant mon départ.



Ce sera parfait pour faire chauffer la soupe du soir.
Pensant trouver Martine inquiète de mon absence prolongée, je me rassure en la trouvant l’appareil photo à la main, mitraillant le coucher de soleil et les troupeaux de chevaux. Nous chauffons la soupe de nouilles. Il y a de la montagne partout, nous aurons besoin de calories, ça nous impressionne un peu, prochaine patelin , Duut à 70 km.



21h15, Martine est cuite, allongée. Au départ de Khovd on bidouille dans la caillasse le long de la rivière pendant 5 à 6 km grâce à des gamins qui nous indiquent une fausse piste, pour enfin prendre une bonne direction, et nous arrêter après 16 km, effectués en grande partie dans le sable, ça n’avance pas fort.
On monte la tente en catastrophe sous un coup de vent d’ouest, force 7, qui manque de faire voler la tente. Martine est d’extrêmement mauvaise humeur, on tire ce qu’on peut chacun de son côté, s'attendant à dormir tout mouillés sur les cailloux. Et quand on réussit enfin à trouver après ½ heure de gesticulations dans quel sens se monte la tente, le vent est calmé, la pluie arrêtée, on se retrouve comme deux cloches en se disant : on repart ou on reste, éclats de rire à l’appui.
Vu l’heure, nous restons à regarder les chèvres, et ça nous vaut de la visite : un gamin venu se poster une heure devant la tente, dont la conversation est plus que réduite , malgré mes efforts démesurés et mon excellent accent mongol(…), il répond toujours oui à tout, peut-être par politesse, il est supposé parler russe, anglais, français, mais ça ne facilite pas les échanges. Il se casse enfin, et nous partageons quelques considérations cartographiques avec des motocyclistes de passage, très intéressés et amusés par la découverte des noms de leurs vallées, montagnes, rivières, décrites sur notre carte.


A la tombée de la nuit, débarque clopin clopant un petit vieux tout cassé, courbé à 90°, marchant avec une canne, tout doucement, que nous appelons E.T. Il a sa yourte cachée derrière une colline à quelques centaines mètres, et bien entendu il a observé notre installation de son perchoir,longue-vue à l’appui. Il s’assoit près de la tente, nous regardant bricoler nos affaires en faisant un thé au jasmin, dont je lui offre un gobelet. Il accepte poliment, trempe ses lèvres , mais quand je veux lui en servir un deuxième, il refuse catégoriquement en agitant la tête, façon de me dire, ton truc c’est vraiment dégueulasse, et nous propose de venir boire un coup chez lui. Ca ne doit pas être le même genre de tisane, nous déclinons l’invitation pour cause de fatigue .Ce qui fut dit fut fait, nous dormons à 1600m près de la montagne Khatuu Uul

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